C’est être reconnu comme professionnel ayant la pleine autonomie de son processus. C’est ainsi pouvoir offrir des services de psychothérapie relationnelle, à tarifs accessibles, avec très peu de contraintes temporelles. C’est croire que les limites de chacune et chacun (client, professionnel, organisation) enrichissent les relations puisqu’elles demandent souplesse, compréhension, humilité et ajustements. Dans cette optique, il n’y a pas de malades et de non-malades. C’est vivre des relations humanistes, coopératives, participatives et égalitaires, où le don de soi est valorisé, respecté et protégé.
C’est sortir de la dualité « public-privé » – ou s’inscrire dans le secteur pluriel (Mintzberg) – et ainsi élargir l’accessibilité à des services. Cela permet de rejoindre une clientèle qui vit des conditions sociales et personnelles diverses et de les accompagner, avec bienveillance, à devenir plus autonomes psychiquement et plus sujets de leur vie. C’est reconnaitre que, dans son désir, personne n’est jamais moins qu’un autre (Nadeau). C’est avoir l’opportunité de faire don du meilleur de soi, de son talent et de son temps, à différents niveaux de l’organisme.
C’est un organisme qui, lors des premières rencontres, en tant que tiers impliqué, dégage le client et le psychothérapeute d’une relation de « charité », offrant un contenant qui donne un sens au tarif adapté. C’est comprendre la complexité de la psychothérapie et la pluralité des façons de l’incarner, sans la brader. C’est avoir accès à un lieu où on se sent comme chez soi, où il y a circulation d'idées, notamment envers l'accessibilité de la psychothérapie, ce qui permet de soutenir nos engagements en toute bienveillance.
À la manière d’un laboratoire, l’organisme permet des relations de sujet à sujet, et devient ainsi un « levier » fécond qui multiplie la force de chacun. Ce lieu permet de mieux se connaitre, de se déployer, de faire grandir nos valeurs, et de les propager. C’est croire que le travail peut ne pas avoir toujours comme unique but le profit (Yunus), mais qu’en contribuant à une société qui offre des valeurs différentes, moins compétitives et consuméristes, on peut aussi se réaliser autrement.
Ce document est le résultat d'une consultation auprès des psychothérapeutes du Levier et des membres du conseil d'administration. Consultation sur leur représentation actuelle du Levier et leur vécu au Levier. Il a ensuite été travaillé par le comité de direction. Il représente la synthèse de nos valeurs, notre boussole pour nous orienter dans nos choix à venir à partir de ce que nous sommes déjà.
En résumé, cela dit que nous ne sommes pas des êtres séparés et que l'on peut choisir de vivre cette interdépendance ensemble, en s'engageant les uns envers les autres dans un processus de cocréation.
Ce document porte l'idéal du Levier. Si nous ne portions pas un peu d'idéalisme, de rêve, pour Le Levier, celui-ci serait fermé depuis longtemps.
Comprendre ce document, c'est aussi comprendre que Le Levier, ce n'est pas uniquement un lieu pour trouver un psychothérapeute à tarif réduit ou pour que le psychothérapeute puisse obtenir facilement des références ou un bureau. C'est beaucoup plus que ça.
Alors ce serait quoi être Levier ? Sans être Levier, il n'y aurait pas de Levier. Le Levier est un nous. Un nous entre un client et un psychothérapeute, un nous entre un psychothérapeute et un autre psychothérapeute, un nous entre les psychothérapeutes et les membres du conseil d'administration. Mais, pour qu'il y ait un nous, même si un être n'existe pas séparément, il existe des sujets en lien avec d'autres sujets.
Alors, c'est d'abord être sujet (première case du document). Soulignons dans ce paragraphe les mots autonomie, et pas de malades et de non-malades. Nous souhaitons offrir à chaque professionnel un espace pour se déployer dans son autonomie professionnelle. Et nous croyons que nous sommes humains exactement de la même façon que nos clients, pas moins inclus dans toute la complexité des divers enjeux développementaux que nos clients, pas nécessairement moins "malades", mais avec un rôle différent, une responsabilité différente, des buts différents. Par exemple nous avons tous été touchés par la pandémie, chacun à sa façon. Et cela n'empêche pas un psychothérapeute de se mettre au service de son client; au contraire, cela lui permet l'empathie, la compréhension.
Sur la deuxième case intitulée permettre à l'autre d'être sujet, nous voulons permettre que chacun, dans sa différence, ait sa place. Soulignons ici : personne dans son désir n'est jamais moins qu'un autre. Nous pouvons offrir une psychothérapie à long terme à quelques personnes qui n'auraient pas pu la trouver ailleurs. Ce n'est pas parce que leur budget ne leur permet pas de dépenser 100 $ ou plus par semaine durant des mois qu'ils n'ont pas un désir tout aussi grand de s'engager pleinement dans un travail sur eux.
Troisième case : pour soutenir et être soutenu, ici nous soulignons le tiers impliqué et la circulation d'idées. Le Levier, tel un organisme vivant, évolue. Nous sommes très engagés pour nous adapter aux besoins et aux demandes. C'est un lieu de souplesse, sans frontière entre CA et psy pour que nous soyons solidaires, reliés, pour demeurer au service des clients de façon unitaire, dans la flexibilité et la pluralité.
Et enfin, la quatrième case : en être transformé, ici nous soulignons le mot fécond. Chacun, à son rythme, à sa façon, a une place pour se déployer, il va la découvrir un peu ou beaucoup, la prendre aussi un peu ou beaucoup. Le Levier peut être Levier pour chacun (clients, psychothérapeutes, administration). Parce que cette transformation peut dépasser largement notre petite communauté, soulignons l'importance de la dernière phrase : en contribuant à une société qui offre des valeurs différentes, moins compétitives et consuméristes, on peut aussi se réaliser autrement. C'est aussi ça notre nous qu'on construit ensemble. Un rêve d'une société où chacun est engagé, et peut vivre ses valeurs avec d'autres pour un mieux-être partagé et inspirant.
Agnès JouanMembre du comité de direction
Psychothérapeute au Levier depuis 2010
(Présenté à l’AGA de juin 2020)